L'art-thérapie, s'exprimer en créant
par Edith Viarmé, directrice pédagogique de l'INECAT,
l'Institut national d'expression et de création, art-thérapie.
Il y a des moments où les mots ne suffisent pas pour entrer en contact avec ses émotions profondes, ses sentiments refoulés. L'art-thérapie propose un autre langage.
Quel est le principe de l'art-thérapie ?
Dans une thérapie classique, on parle. On utilise des mots qui vont dire son état, sa souffrance, son passé, son histoire. C'est parfois très difficile, cela soulage le plus souvent, mais est-ce que cela dure ? La parole a certes un effet de catharsis, mais pas de refondation.
En art-thérapie, nous proposons à ceux qui souhaitent entreprendre un travail personnel, de s'aider non pas du langage verbal, mais d'un langage issu du FAIRE, de la création, leur création. Nous les aidons à exprimer autre chose et à le redonner sous forme tactile, visuelle, plastique. L'art-thérapie offre en fait au patient l'occasion de faire émerger ce qui est à l'intérieur de lui, qu'il ne connaît pas forcément et qu'il ne reconnaîtra pas forcément dans son travail. Car il entre en contact avec ses émotions les plus enfouies, des sentiments le plus souvent refoulés.
La première étape de ce travail consiste donc à remettre le patient en mouvement, à montrer les voies possibles devant une toile blanche, une motte de terre, une scène vide... Une fois le processus enclenché, il s'agit ensuite de donner forme et d'approcher au plus prés les problématiques inconscientes du patient.
Quel est le rôle de l'art-thérapeute ?
Son rôle est à la fois indispensable et discret. Il est là pour encourager le patient à laisser parler sa créativité. Car on ne lui demande pas de reproduire ce qu'il connaît, on ne lui propose aucun modèle à sculpter, peindre ou imiter. On lui demande du très personnel. L'art-thérapeute est donc là pour le guider progressivement, et l'empêcher d'aller tout de suite là où ça fait mal. On contourne, on emprunte des chemins détournés. Pas question que la personne soit effrayée par sa propre production car dans ce cas, elle stoppera net son travail. Le but de l'art-thérapie n'est pas de vouloir savoir (ce qui s'est passé, car cela, les patients le savent généralement), mais de savoir l'exprimer. Mais de puissantes résistances surgissent toujours. Notre principe n'est donc pas de les attaquer de front mais de les atteindre par d'autres voies, moins directes mais tout aussi efficaces.
Enfin, dernière précision toujours utile, l'art-thérapeute n'est pas là pour traduire ce que crée le patient, pour y trouver à chaque fois une symbolique. Rouge ne veut pas dire forcément agressif, un trait vertical n'est pas forcément phallique. Il n'y a pas d'interprétation d'œuvre, mais un travail sur la création et son évolution.
A qui s'adresse l'art-thérapie ?
A tous ceux qui souhaitent accéder à une meilleure connaissance d'eux-mêmes, et qui ont du mal avec la parole et les mots. L'art-thérapie s'avère merveilleusement adaptée pour les enfants notamment, qui ont souvent du mal à exprimer ce qui est au plus profond d'eux-mêmes. En revanche, je la déconseille à tous ceux qui ont de grandes dispositions artistiques, car ils auront beaucoup de mal à ne pas se réfugier dans la technique pour éviter de lâcher prise.En revanche, pour tous ceux qui pensent ne rien savoir faire, qu'ils se rassurent.
Entre la peinture, la sculpture, la danse , le théâtre, le dessin, les tissus, le maquillage, la création de masques, la musique, les contes... ils trouveront toujours un ou plusieurs moyens de s'exprimer, parfois avec talent, toujours avec sincérité.